Une équipe internationale avec participation suisse a découvert un composant chimique, efficace chez la souris, qui ouvre la voie au développement d'un nouveau traitement contre le paludisme.L'agent chimique, baptisé «spiroindolone NITD609», pourrait, avec une dose unique, détruire les parasites du paludisme dans le sang, précise le Dr Elizabeth Winzeler, du Scripps Research Institute, un institut privé de recherche de Californie. Selon elle, les premiers essais cliniques humains pourraient débuter dès la fin de l'année.
Le Dr Winzeler est l'une des principales co-auteurs de cette étude publiée dans la revue américaine «Science». «Nous avons été enthousiasmés par le potentiel du NITD609 révélé dans les premières séries d'expériences en éprouvette», a-t-elle dit dans un communiqué.
«Notre enthousiasme a été encore plus grand après avoir testé, avec nos collègues de l'Institut tropical suisse à Bâle (Swiss TPH), cet agent sur des souris à qui on avait inoculé le paludisme», poursuit-elle.
Prise unique
Normalement, les rongeurs infectés avec le Plasmodium berghei, le parasite du paludisme chez les souris, meurent en une semaine. Mais une seule dose importante de NITD609 a guéri cinq souris infectées tandis qu'une dose plus faible n'a été efficace que pour la moitié de six autres.
Un médicament à prise unique contre la malaria constituerait «un avantage énorme» en terme d'observance et de suivi des patients dans des zones de crise, a indiqué à l'ATS Reto Brun, du Swiss TPH, co- auteur de l'étude.
Il a également jugé très encourageant le fait que la molécule appartienne à une classe de substances jamais utilisées contre la malaria. Mais il faudra au minimum cinq ans avant qu'un médicament soit éventuellement mis sur le marché.
Pas toxique pour des cellules humaines
Les chercheurs ont comparé l'efficacité de ce nouvel agent avec d'autres anti-paludéens existants. Ils ont conclu que le NITD609 était de loin le plus efficace, même si ses effets n'ont pas été aussi rapides que ceux de l'artémisinine. Ce dernier est le meilleur traitement actuel contre le paludisme.
D'autres tests de laboratoire ont également montré que le NITD609 n'était pas toxique pour une variété de cellules humaines. L'agent a été découvert après que les chercheurs eurent passé au crible 12'000 agents chimiques.
Besoin de nouvelles thérapies
«Il n'y pas eu de nouveau traitement anti-paludéen développé depuis plus de dix ans, lorsque l'artémisinine - dérivé d'une plante chinoise - a commencé à être largement utilisée», constate Anthony Fauci, directeur de l'Institut américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAID), qui a financé une partie de cette recherche commencée en 2007.
De plus, «la résistance grandissante à l'artémisinine du Plasmodium falciparum - parasite responsable du paludisme chez l'homme - rend encore plus nécessaire le développement de nouvelles thérapies anti-paludéennes», ajoute-t-il dans un communiqué. Le Dr Fauci relève que la maladie fait encore près d'un million de morts chaque année sur les quelque 247 millions de cas dénombrés.
Novartis participe
Ce nouveau composant chimique «paraît cibler une protéine du parasite qui n'est visée par aucun des anti-paludéens existants», explique le Dr Fauci.
Il note également que cette recherche est «un exemple de collaboration réussie entre des chercheurs du gouvernement fédéral et du secteur privé.» Outre le gouvernement américain, le groupe pharmaceutique suisse Novartis et le Wellcome Trust, institution caritative britannique, ont contribué à ces travaux